Table ronde consacrée à l'IA dans le secteur maritime lors des AI Days 2022 avec Alice de Joux (Technopôle Brest-Iroise), Simon Benaiïchouche (eOdyn, IMT Atlantique), John Queffélec (BluePulse) et Christophe Desbois (Blue HUB d'ISblue). |
Dans le domaine maritime, l’IA est partout. Le monde du nautisme et en particulier celui de la course au large ont déjà embarqué l’IA, comme l’avait mis en évidence la table-ronde animée par Rachel Portal-Sellin (Finistère Mer Vent) lors des AI Days 2021. L’utilisation de solutions IA de SenX par AIM45 pour la l’analyse et la visualisation de données de capteurs dispatchés sur les bateaux de course en est un exemple.
La Présidente de la Commission Européenne Ursula von der Leyen lors du One Ocean Summit, Brest 2022? ©Commission européenne |
L’IA est également mobilisée pour l’observation et la modélisation des océans, avec l’impulsion donnée par la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen lors du One Ocean Summit en faveur de la création d’un jumeau numérique de l’océan à l’horizon 2024. En combinant modélisation océanique de nouvelle génération et d’autres données scientifiques, économiques et statistiques, cette plateforme renforcera l’indispensable partage de connaissances pour une utilisation des ressources marines compatible avec la préservation des écosystèmes marins.
Ces enjeux seront de nouveau abordés en septembre lors de la session « IA in Meteorology and Oceanography » organisée pendant la Sea Tech Week® par IMT Atlantique et l’Institut japonais RIKEN ; les inscriptions sont ouvertes !
L’observation de la biodiversité sous-marine intègre de plus en plus des méthodes d’IA. Le projet IA 4 KOSMOS du Konk Ar Lab de Concarneau avec l’appui de l’Ifremer, fait appel à des techniques de machine learning pour automatiser des tâches de reconnaissance et de comptage de poissons. Ce projet essaime au sein de Blue HUB avec un POC fabriqué à La Forge, le FabLab de l’ENIB, et qui sera déployé pour des essais en mer au sein du Parc naturel marin d’Iroise en 2023.
Pour l’étude des communautés benthiques, le projet emblématique de l’EUR ISBlue Blue Revolution réunit l’Ifremer, l’ENIB, le Lab-STICC et d’autres partenaires académiques internationaux pour développer des méthodes de microscopie, d’imagerie in situ et des outils de classification basés sur l’IA pour générer des données quantitatives et fonctionnelles. En se basant sur ces espèces bioindicatrices, l’objectif est aussi d’évaluer les changements environnementaux mondiaux.
Les capteurs dédiés à l’observation équipent donc des instruments des grands fonds jusqu’à l’espace. En plein essor également pour leurs capacités d’exploration, les drones sont au cœur d’innovations duales, avec par exemple ECA group qui met en œuvre des méthodologies d’Intelligence Artificielle appliquées au système robotique et autonome.
Plus largement, la défense mobilise des techniques d’IA, que ce soit pour la détection de mines par Thales, ou lorsque l’Ecole Navale développe des applications d’aide à la décision en temps réel et analyse des données de positionnement AIS (Système d’identification automatique) pour la détection de comportements suspects.
Dans le secteur du transport maritime, ces applications sont tout aussi larges et ont été illustrées par les intervenants de la table-ronde.
L’IA est utilisée pour optimiser le routage maritime, pour sécuriser la navigation. Quand on évoque les navires du futur, on fait référence à des navires plus intelligents, plus autonomes et plus économes en énergie. Quand on évoque les ports du futur, on fait référence à une gestion optimisée des flux, des stocks et de la maintenance.
L’entreprise eOdyn reconstruit les courants marins de surface à partir des signaux AIS et propose ainsi une solution d’optimisation du routage maritime SeaWazeTM permettant des gains conséquents en énergie. Simon Benaïchouche a démontré pendant sa thèse dans le cadre de travaux conjoints eOdyn/IMT Atlantique que le deep learning permet un saut qualitatif dans la génération des champs de courants.
L’entreprise BluePulse positionnée à Aix-en-Provence et Brest, développe des solutions d’IA pour le transport maritime réfrigéré, un secteur en forte croissance mais à fort impact environnemental. Utilisant des modèles brevetés de Deep Learning et d’Apprentissage supervisés, les solutions développées par BluePulse exploitent les données IoT de plus en plus présentes dans le domaine maritime, et réduisent cet impact en développant des programmes de maintenance prédictive des containers réfrigérés, des solutions d’optimisation de routage des portes containers et de détection d’intrusion illégales dans les containers par images satellites.
De telles innovations dans le domaine de l’IA s’appuient sur une recherche d’excellence et des cadres propices aux interactions recherche-entreprise, comme l’est aujourd’hui la chaire AI OceaniX pilotée par Ronan Fablet, professeur à IMT Atlantique. Cette chaire de recherche et d’enseignement sur la thématique de la dynamique des océans réunit des laboratoires de recherche, des partenaires institutionnels, industriels (dont eOdyn) et internationaux. Tous ensemble, ces acteurs relèvent le défi de l’amélioration de la capacité de prédiction et de simulation des paramètres de l’océan, ainsi que celui de l’optimisation des ressources d’observation.
L'équipe IA 4 KOSMOS, Ocean Hackathon® 2021 à Brest |
L’innovation ouverte favorise l’émergence de projets des start-up et entreprises innovantes. Ocean Hackathon® permet depuis 7 ans à des entreprises de booster leurs projets en s’appuyant sur des équipes pluridisciplinaires et en ayant accès à des données maritimes. En 2021, certaines équipes brestoises ont pu bénéficier d’un accompagnement par des coachs spécialisés en IA, dont le projet IA 4 KOSMOS cité plus haut.
La question des infrastructures numériques est centrale dans la gestion et le traitement du flux de données. Dans la cadre du Blue HUB et de la chaire AI OceaniX, des groupes d’étudiants peuvent accéder au supercalculateur DATARMOR et à sa « Sandbox » pour tester des algorithmes sur de nouveaux jeux de données.
Les entreprises locales peuvent aussi compter sur l’adaptation de l’offre de formation et ainsi recruter des étudiants formés en IA. IMT Atlantique, l’ISEN et l’ENSTA Bretagne ont créé des modules dédiés à l’IA dans leurs parcours d’ingénieurs, avec des spécialisations possibles en réalité virtuelle à l’ENIB, ou en supply chaine appliquée aux ports à Brest Business School. Dans le cadre de ISblue, le parcours Ocean Data Science (SDO) du master international Marine Sciences, co-accrédité par l’IUEM à l’UBO, l’ENSTA Bretagne et IMT Atlantique crée les interfaces entre l’IA et la modélisation physique de l’océan. Cette offre de formation d’excellence est complétée par l’ouverture depuis 2 ans de l’école IA Microsoft by Simplon à l’ISEN, offrant à des personnes éloignées de l’emploi l’opportunité de se spécialiser en IA et d’intégrer, en alternance, des entreprises de l’écosystème.
Recherche, formation et innovation, le triptyque gagnant pour le développement de l’IA dans l’ouest Bretagne !