Application de l’intelligence artificielle dans le maritime : deux tables rondes aux AI Days 2024

Crédit photo : Technopôle Brest-Iroise

Première table ronde : L’IA, un outil incontournable pour les sciences marines et technologiques 

Il est 10h30, la plénière de cette 4ème édition des AI DAYS est terminée et laisse maintenant la place aux premières tables rondes. La table ronde intitulée " L’IA, un outil incontournable pour les sciences marines et technologiques " se tient dans l’espace central du village by CA, au premier étage des Ateliers des Capucins. Une quarantaine de personnes y sont présentes. Anaëlle Saliou, chargée de mission au sein du Campus mondial de la mer et animatrice de cette rencontre, est accompagnée de trois acteurs locaux pour mettre en avant des cas concrets de l’utilisation de l’IA dans leurs activités professionnelles : Pierre-Yves Colson d’eOdyn, Marjolaine Matabos d’Ifremer et Lucas Yakhontoff d’Hytech-imaging nous expliquent.

L'intelligence artificielle au service de la recherche maritime

• Pierre-Yves Colson, eOdyn utilise les données AIS* pour prédire les courants marins à partir de la dérive des navires. L’IA permet d’assimiler et de traiter de plus en plus de données, facilitant ainsi la mise en production des algorithmes. Contrairement aux méthodes classiques nécessitant la création de systèmes linéaires, l'IA permet de les utiliser directement les données AIS pour obtenir ces courants marins. Une fois entraîné, le réseau de neurones prédit rapidement et efficacement, ce qui est avantageux pour fournir un service. 
• Et demain ? L'IA pourrait être intégrée à bord des navires. eOdyn développe un boîtier embarqué capable de collecter des informations complémentaires sur les conditions de mer, perfectionnant ainsi leur solution.

*(Système d’Identification Automatique : outil et aide à la navigation, ex : données émises par les navires : vitesse, cap, position, etc.)

• Marjolaine Matabos, Ifremer utilise l'imagerie pour cartographier les habitats marins et décrire l’évolution de la biodiversité. L'acquisition d'un grand nombre d'images se fait par différents vecteurs, tels que des submersibles, des caméras autonomes, des caméras connectées à des observatoires sous-marins, et bientôt des AUV et des drones. Plus de 7000 heures de vidéo ont été collectées. Ces données nécessitent une annotation manuelle, ce qui est long et sujet à erreurs. L'IA est essentielle pour exploiter ces données et relever les défis sociétaux, notamment pour répondre aux questions urgentes sur l'impact du changement climatique et des activités humaines. Les objectifs incluent la cartographie, la description de la biodiversité, et l'exploration dans le cadre de la Décennie des Nations unies pour les sciences océaniques au service du développement durable et du programme "Grand fonds marins" de France 2030.
• Et demain ? L’IA pourrait être embarquée pour gérer les capteurs, le déclenchement des mesures et des enregistrements, en réponse à certains signaux environnementaux.

• Lucas Yakhontoff, Hytech-imaging traite des dizaines de milliers d'images en haute définition prises lors des survols du littoral. Ils prennent entre 40 000 et 50 000 images par vol, sur 4 sites en France, deux fois par an. Cela représente entre 300 000 et 400 000 images. Chaque nouveau partenariat augmente la quantité de données à traiter et allonge les délais de livraison. L'automatisation de l'annotation est cruciale, un besoin encore plus pressant avec l'usage croissant des drones. Les volumes de données devenant encore plus importants, l'usage de l'IA devient indispensable.
• Et demain ? Si l'IA répond à leurs besoins actuels en matière d'analyse d'image, l'équipe de Hytech-Imaging envisage de l'appliquer à d'autres domaines d’application de l'entreprise, telles que la qualité de l'eau / pollution, la bathymétrie, la détection des algues, la prospection minière sous-marine, ou encore l’archéologie marine.  

Pour les 3 experts, l’IA est un outil dans chacun de leurs domaines respectifs. Elle facilite le travail des spécialistes, leur permettant ainsi d'être plus efficaces au quotidien. 

De gauche à droite : Pierre-Yves Colson, Anaëlle Saliou, Lucas Yakhontoff,  Marjolaine Matabos. Crédit photo : Technopôle Brest-Iroise

Seconde table ronde : La dronisation de l’espace maritime 

Il est 11h40, la première table ronde vient de se terminer après des échanges riches qui ont satisfait les auditeurs à en croire leurs applaudissements. Nous avons la chance de rencontrer trois acteurs locaux spécialistes des drones maritimes. 

L’intégration de l’intelligence artificielle aux drones maritimes : 

• Sébastien Tauvry, Brest site Manager - Exail / Marine Data Processing - Product Owner  :  Après une présentation des drones produits par Exail, Sébastien Tauvry soulignait que l'intégration de l'IA se jouait principalement dans l'optimisation de la collecte et de l'analyse des données récoltées par les drones. Les drones maritimes d'Exail sont utilisés pour diverses missions, allant de la surveillance environnementale à la cartographie sous-marine. L'IA appliquée à des données en temps réel améliorera la précision et l'efficacité des missions.
• Par exemple, les algorithmes d'IA pourraient analyser les images et les données sonar pour détecter des anomalies ou identifier des objets d'intérêt, réduisant ainsi la charge de travail des opérateurs humains et augmentant la réactivité des drones en mission.

Présentation d'un drone Exail. Crédit photo : Technopôle Brest-Iroise

• Andreas Arnold, R&D engineer - Thales Defense Mission Systems  : Chez Thales, l'utilisation de l'intelligence artificielle dans les drones maritimes viserait principalement à améliorer l'identification et l'interprétation des informations recueillies. Andreas Arnold explique que l'IA permettrait de réduire les risques des collisions.
• Par exemple, les drones équipés de sonars pourraient bénéficier de l'IA pour interpréter les signaux et prendre des décisions autonomes. L'IA pourrait traiter les données du sonar, identifier les menaces potentielles et aider à naviguer en toute sécurité, ce qui est crucial pour les missions de défense et de surveillance maritime.  

• Henrique F. Gasparoto, Research Team Leader of L@bISEN Autonomous Robots (AutoROB) met en avant l'intérêt de l'intelligence artificielle pour pallier les incidents survenant en cours de mission. Le principe d'auto-réparation et d'auto-diagnostic, rendu possible par l'IA, permettrait aux drones de poursuivre leur mission initiale malgré les incidents.
• Par exemple, si un capteur du drone rencontrait un problème, l'IA pourrait diagnostiquer et contourner l'erreur, ajustant les opérations pour maintenir l'efficacité de la mission. Cette capacité d'adaptation serait essentielle pour les missions en milieu marin où les conditions peuvent être imprévisibles et difficiles. 

Présentation d'un prototype étudiant. Crédit photo : Technopôle Brest-Iroise

Les trois intervenants ont souligné que, bien que les drones actuels utilisent une technologie de pointe, notamment dans les domaines militaires et de la défense où certaines applications sont déjà parfaitement fonctionnelles, l'intelligence artificielle peut se rajouter pour perfectionner certains outils et capacités des drones. Ils ont également noté qu'une réinvention totale des drones à partir de l'IA n'est pas nécessairement bénéfique pour le moment, car certaines technologies existantes sont déjà très performantes.